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Pogne ou Gratin ?
L’exposition du musée de Grenoble Grenoble et ses artistes au XIXe siècle met en lumière la richesse de la création de cette époque et fait revivre un passé oublié malgré les nombreuses traces qui subsistent dans la ville : sculptures, fontaines, frontons et bas-reliefs, noms de rues et sépultures du cimetière Saint-Roch.

©Collection Musée Dauphinois
Au XIXe siècle, les artistes, principalement des hommes, se côtoient d’abord dans les écoles municipales (de dessin, de sculpture architecturale ou de moulages décoratifs), puis dans les débits de boissons au cadre chaleureux (il y en a 297 en 1863), ou encore chez certains d’entre eux.
Les liens interpersonnels sont importants, et en dehors des périodes studieuses et solitaires de création, ils se retrouvent sur la place Grenette, dans la taverne des Mille-Colonnes ou au café Repellin. Ils organisent des rencontres amicales et festives ouvertes aux autres arts et aux amateurs, et assurent de l’entraide en cas de besoin.
Certains artistes, comme Victor Sappey (sculpteur), organisent des fêtes dans leur atelier, ou à leur domicile tels Hector Gruyer (ténor) et son épouse Eugénie, à Sassenage. C’est l’occasion de jeux de société, de ripailles ou de discussions sur l’art…
Mélanges des genres
Dans la seconde moitié du XIXe siècle, Proveysieux devient un lieu de rencontre familial et amical des élites et des artistes autour du peintre Théodore Ravanat et du poète Aristide Albert.
« Les uns et les autres se nourrissent de ces rassemblements où différentes pratiques artistiques se côtoient : outre les peintres et les sculpteurs, on peut y fréquenter des musiciens, des écrivains et des poètes, des photographes professionnels et des architectes », indique Valérie Huss, conservatrice du patrimoine et commissaire de l’exposition.
Se serrer la pogne
Le XIXe siècle, c’est aussi le siècle des sociétés et autres amicales. La Société de la Pogne est créée en 1882 et rassemble jusqu’à trente adhérents : peintres, sculpteurs, architectes, musiciens et hommes de lettres. Si une place est vacante, la société peut accueillir toute personne ayant « un caractère ou des affinités artistiques ».
Les réunions des « Pognons », en fait des dîners réguliers, sont l’occasion de joyeuses soirées, souvent bien arrosées où l’on chante en chœur et en frappant du verre sur la table la Chanson de la Pogne, ritournelle dont le refrain donne le ton :
Vivent les arts, l’amour et les chansons,
Chers Compagnons,
Voilà, voilà le refrain des Pognons !
Gratin dauphinois

La Vénus de la Pogne,
Henri Ding, 1882. ©Jean-Luc Lacroix / Musée de Grenoble
Le Gratin, société artistique et littéraire dauphinoise, est fondé à Paris en 1884. Il rassemble des membres issus de l’Isère, de la Drôme et des Hautes-Alpes lors de banquets rituels et d’une « fête d’hiver » avec repas, concert et bal. Une sous-section grenobloise du Gratin permet aux adhérents de fêter le retour des « Dauphinois de Paris » pendant l’été.
Contrairement à la société de la Pogne, la société du Gratin n’a ni règlement ni statuts, mais dispose d’une revue illustrée, Le Gratin, petite gazette dauphinoise, consacrée à l’actualité artistique.
D’abord présidée par l’artiste lyrique Marius Salomon, elle l’est ensuite par le peintre Eugène Ronjat. Pour adhérer au Gratin et devenir « gratineur », il suffit « de justifier de la qualité de bon Dauphinois » !
Renseignements divers
En savoir plus : Grenoble et ses Artistes au XIXe siècle, du 14 mars au 28 juin. Coordination scientifique et suivi éditorial : Valérie Huss, Éditions Snoeck, 2020. http://www.museedegrenoble.fr
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