Propreté urbaine
Le ballet des hommes en jaune
Qu’il pleuve, qu’il vente ou qu’il neige, les agents de la Propreté urbaine rendent chaque jour la ville propre et nette. Leur rôle est primordial, notamment pour effacer toutes nos petites incivilités. Reportage avec les équipes du secteur 2, dans le centre-ville.
« La ville doit être propre quand les gens se lèvent » explique Pierre Gautier-Mare, agent de maîtrise de la Propreté urbaine, dans le secteur 2. « L’essentiel de notre travail se concentre donc entre 6h et 8h30 sur l’hypercentre. » Ainsi, un étrange ballet d’hommes en gilet jaune fluo et de véhicules blancs se déploie chaque jour, bien avant le lever du soleil, sur l’ensemble de la ville.
Une mécanique bien rodée qui commence à 5h30, heure de la prise de service des équipes matinales. « Les six secteurs grenoblois sont couverts par huit équipes de cantonniers, auxquelles s’ajoutent des équipes qui s’occupent du lavage et balayage mécanisés, ainsi que des équipes spécialisées qui ont en charge la dératisation, les fontaines, les graffitis, les WC publics… » analyse David Lefebvre, directeur du service de la Propreté urbaine de Grenoble. « Au total, cela représente 229 agents, mobilisés sept jours sur sept, de 5h à 19h30. »
Leurs missions ? Balayer et laver les trottoirs et les caniveaux de toute la ville, nettoyer les parcs canins, vider les corbeilles, faire disparaître les tags et l’affichage sauvage, enlever les herbes folles et les feuilles mortes, retirer les encombrants et les dépôts sauvages – alors que cette charge de travail ne fait pas partie des missions de la Propreté urbaine -, déneiger quand la neige pointe le bout de son nez…
Une équation pas simple
Zone prioritaire, le secteur 2 – qui s’étend de l’Île Verte aux grands boulevards, en incluant l’hypercentre, Saint-Laurent, la Caserne de Bonne et Championnet – nécessite à lui seul trois équipes (une quarantaine d’agents environ) et concentre une bonne partie des actions. Il est divisé en trente parcours, dont la moitié est prioritaire. Cela signifie que ces zones sont nettoyées chaque jour : c’est le cas par exemple des places Grenette, Poulat et Verdun.
« Chaque parcours est défini selon des besoins bien précis » reprend David Lefebvre. « Le Plan de propreté urbaine détermine un ordre de priorité et une fréquence de nettoyage pour toute la ville : minimale pour certaines zones (3 à 5 jours par semaine) et optimale pour d’autres (7 jours par semaine avec deux passages par jour sur certaines rues). Après on l’adapte en fonction des besoins ponctuels et du retour des agents sur le terrain. C’est une équation quotidienne à trouver entre les moyens, les effectifs et les services rendus. »
Avenue Alsace-Lorraine, alors que la nuit est encore noire et les passants rares, une poignée d’agents et leurs véhicules terminent le nettoiement de cette artère prioritaire. « Ici, c’est un lavage et un balayage mécanisés, soutenus par ce qu’on appelle un balayage d’accompagnement » explique Bernard Bicais, coordinateur des équipes manuelles du secteur 2. « Mais, il existe de nombreux endroits où les machines ne peuvent passer, soit parce qu’il y a des potelets, des voitures garées… Soit parce que les machines sont bruyantes et risqueraient de réveiller les riverains. Dans ces cas-là, les agents effectuent un balayage manuel. »
Au Jardin de Ville, alors que le jour s’est enfin levé, plusieurs agents s’affairent à rendre le lieu impeccable en vidant les corbeilles, en nettoyant les bancs et les toilettes publiques mais aussi en ramassant les déjections canines – celles du parc canin du lieu mais aussi toutes celles laissées en dehors par des propriétaires peu soucieux d’avoir un comportement civique.
Des agents très spéciaux
Plus au sud, dans le quartier Championnet, une équipe bien particulière s’attelle à une tout autre mission : effacer les tags, les graffitis et les affiches. Ses sept agents parcourent ainsi l’intégralité de la ville selon des parcours définis et recouvrent chaque année 36 000 mètres carrés. Ce jour-là, dans une combinaison qui n’est pas sans faire penser à celle d’un astronaute, l’agent Philippe Imbert s’escrime à faire disparaître un tag noir sur un mur de la rue de Turenne, en utilisant la technique de l’hydrogommage – un tuyau avec une buse à son extrémité qui propulse du sable sous haute pression sur la surface à nettoyer.
En face, son collègue Eric Joubert a quant à lui recours à la peinture pour recouvrir un bonhomme dessiné sous le panneau de la rue. « Les affiches sauvages et les autocollants sur les poteaux, les lampadaires… sont aussi très difficiles à enlever en raison des colles utilisées » explique-t-il.
Au moment où le dessin disparaît sous le coup de main habile de l’agent, une voiture s’arrête à sa hauteur. Une remarque désagréable sur l’inefficacité des agents fuse. « C’est presque quotidien » soupire David Couvain, agent de maîtrise de cette équipe tags et graffitis. « On se fait régulièrement traiter de fainéants, de bons à rien… On est habitués mais ça reste toujours blessant. »
Un travail de fourmi
Loin d’être un cas isolé, cette agression verbale révèle le manque de considération et de respect, voire le mépris, qu’ont certains Grenoblois pour le service effectué par les agents de la Propreté urbaine. « Les gens ne réalisent pas le travail de fourmi que nous réalisons chaque jour » analyse Pierre Gautier-Mare. « Nous commençons le nettoiement à 6h mais, à 9h, la ville est sale de nouveau : les gens pensent alors que l’on n’est pas intervenus. C’est un travail qui manque de visibilité, ce qui créé des incompréhensions, parfois des tensions. »
Effacer toutes nos incivilités, petites et grandes, sont le lot commun de ces agents dont le métier, peu valorisé, est rendu encore plus pénible par les conditions météo. Le froid, la pluie, le vent et la neige compliquent un travail déjà physiquement difficile, aux gestes répétitifs.
Les lendemains de fête, tels que les soirées du bac, les grands matchs de foot, le Beaujolais nouveau ou encore les concerts du Cabaret frappé, sont autant de témoins des actions invisibles menées par les agents. Il suffit pour cela de quitter tard les lieux, alors jonchés de bouteilles et autres détritus, pour les retrouver, quelques heures plus tard, entièrement nettoyés et reluisants.
Pour mettre en lumière leur rôle, et proposer à chacun de contribuer à l’embellissement de Grenoble, la Ville organise, le 30 avril, La Belle saison, journée de « Grand Ménage de Printemps » (lire ci-contre). Cette journée sera l’occasion de rappeler l’importance du rôle de chacun pour préserver et améliorer Grenoble, notre patrimoine commun. « 80 % du travail des agents est dû à des incivilités » insiste David Lefebvre. « L’objectif de cette journée est de donner rendez-vous aux Grenoblois pour leur faire découvrir ce que la Ville fait déjà pour eux, plusieurs fois par jour, toute l’année, et pour leur proposer de venir nous aider à la rendre encore plus agréable. Quand on s’y met tous, la Ville est plus belle ! »
Au tour des équipes de l’après-midi
13h30: les équipes du matin ont terminé leur service, place désormais aux équipes de l’après-midi, qui commencent leur service par le nettoiement des places où se tiennent la dizaine de marchés grenoblois. Sur la place Saint-Bruno, quatre agents sont sur place : deux d’entre eux ramassent manuellement les cartons, cagettes, cintres… pour former un tas alors que deux autres arpentent la place avec une laveuse et une balayeuse.
Au volant de l’un des deux véhicules, Maurice Chabanne, agent de la propreté urbaine depuis plus d’une trentaine d’années, admet que c’est un métier « où il faut savoir communiquer. Ici, il y a une bonne entente avec les commerçants et les riverains car on se parle, on échange. Les gens comprennent bien ce que l’on fait. Nous, notre vrai problème c’est le stationnement précoce. Il n’est autorisé qu’à partir de 14h sur la place mais les gens viennent se garer avant. Donc, ça complique vraiment le nettoiement et le passage des machines… »
En une heure, la place Saint-Bruno sera entièrement nettoyée et redevenue toute propre… jusqu’à demain, où, comme partout dans la ville, tout sera à refaire !
« Les Grenoblois sont aussi acteurs de la propreté urbaine »
Interview de Sébastien Mazerat, agent de la Propreté urbaine et chef d’équipe du secteur 2

Comment caractériser le métier d’agent de la Propreté urbaine ?
C’est un métier peu valorisant car, chaque matin, on remet les compteurs à zéro et tout est à refaire ! Mais c’est un réel travail d’équipe. On fait tourner les postes pour que chacun puisse voir les difficultés rencontrées par les collègues sur d’autres parcours. Ainsi, on échange, on se donne notre avis… Cela crée une vraie entraide.
Quelles relations entretenez-vous avec les riverains et les commerçants ?
Certains usagers nous félicitent, d’autres se plaignent car, pour eux, la ville n’est pas assez propre. Pourtant, les agents sont là et font leur travail correctement. Mais il faut souvent expliquer que la ville se resalit très vite parce que tout le monde n’y met pas du sien…
Qu’avez-vous envie de dire aux Grenoblois pour qu’ils respectent mieux votre travail ?
Aidez-nous ! Ne jetez pas vos mégots et déchets au sol, n’abandonnez pas d’encombrants sur les trottoirs, ramassez les déjections canines de votre chien… Les Grenoblois sont aussi acteurs de la Propreté urbaine et ont un rôle à jouer, une responsabilité, pour rendre la ville moins sale. Si chacun joue le jeu, ce sera plus agréable pour tout le monde !
Commentaire de jean le 2 mars 2016 à 13 h 28 min
Ce qui choque le plus quand on rentre dans Grenoble c’est l’état des grands boulevards : éclairage public à l’abandon avec les luminaires cassés jamais remplacés, espaces verts détériorés et des tags de partout qui ne sont jamais enlevés… Malgré tout ça, Grenoble reste une belle ville.