Marcos Woortman, Brasilia
"Le processus doit être collectif et populaire, c'est ici que la confiance se trouve"
Marcos Woortmann, maire d’arrondissement de Brasilia (Brési).
Depuis combien de temps êtes-vous engagés dans une démarche de transition ?
Depuis 2008, premièrement en travaillant avec des communautés vulnérables et avec les jeunes au Ministère du Travail du Brésil, puis avec les communautés indigènes qui deviennent urbaines avec l’Institut Raoni.
A partir de 2011, je suis devenu un administrateur municipal dans l’administration Lago Norte de Brasilia ainsi qu’un militant social.
Qu’est-ce qui vous a poussé à entrer dans cette démarche ?
La lucidité par rapport aux changements que l’humanité va affronter au cours de nos vies et qui seront d’une ampleur imprévue.
Et si, et il s’agit d’un important « si », nous avons tous les engrenages nécessaires à ces changements dans les mains de la société civile, dans des démocraties dynamiques et conscientes écologiquement parlant, il pourrait y avoir un bien meilleur monde que celui dans lequel nous vivons actuellement.
Par quelle thématique avez-vous commencé (énergie, agriculture, déplacements, déchets, habitat, démocratie participative…) et pourquoi ?
Par la participation citoyenne comme un moyen de consolider des projets coopératifs avec un réseau de communautés engagées, sur des sujets divers : organisation de marchés d’agriculture biologique, projets d’extension, préservation des sols et des sources, création de pistes cyclables, diminution de la vitesse pour les voitures en ville, conception de projets d’habitations plus responsables écologiquement, prise en compte de l’environnement local et des corridors urbains fauniques, création de parcs et d’espaces verts.
Comment et pourquoi une ville peut-elle être moteur dans les actions en faveur de la transition ?
Les villes ont été le berceau de la civilisation et avant cela des communautés locales. La force d’une ville consciente [des transitions], avec l’aide des réseaux de citoyens qui ont accès aux moyens de la gouvernance participative et au changement positif, est considérable.
Le défi qu’affronte l’humanité avec le changement climatique demande un réseau de micro-solutions au niveau local qui ne peut naître qu’au niveau des villes et des communautés.
Quels freins avez-vous rencontrés dans la mise en place de votre (vos) projet(s) ?
Le consumérisme, le fétichisme de la voiture, les mentalités coloniales sont des défis transversaux, qui empêchent des personnes d’adopter des habitudes plus saines et de s’engager dans des actions locales de volontariat.
Dans des termes plus pratiques, nous sommes en transition, mais tellement de personnes ont des discours beaucoup trop en avance sur leurs propres pratiques, que ce soit au niveau politique ou dans la société civile, que cela autorise de forts intérêts privés avec peu ou pas de responsabilité collective à prospérer.
En résumé, il y a des industries de la construction et des agences gouvernementales irresponsables, qui sont tolérées par une société permissive qui ne se rend pas compte de son pouvoir, et tout cela est lié avec une bureaucratie inefficace et une structuration de l’Etat fermée qui freine tout changement.
Mais je crois que cela n’est qu’une question de temps et de consolidation démocratique au Brésil. L’enjeu tient dans le fait qu’il ne reste que peu de temps à cause de l’importance des défis qui arrivent, de l’automatisation à l’intelligence artificielle, mais par-dessus-tout à cause du changement climatique.
Les choses doivent être faites, donc l’organisation de la société civile est en haut de l’agenda puisque cela est la condition nécessaire pour tout changement politique positif.
Faites-vous partie d’un réseau international de villes en transition ?
Oui, en politique à travers le RAPS (« Réseau de l’Action Politique Soutenable »), qui fait partie du réseau des villes en transition du Brésil, et dans la société civile à travers l’institut Terrazul, qui est le représentant de la Charte de la Terre au Brésil et qui fait partie du centre écologique « Rede Terra do Futoro ».
L’implication de vos concitoyens a-t-elle été essentielle ?
Absolument. Sans l’engagement des citoyens, nous n’aurions pas pu atteindre le savoir, la motivation, la capillarité et la force de travail nécessaires pour construire notre plateforme de coopération, comme pour n’importe lequel de nos projets d’ailleurs.
Comment avez-vous communiqué en direction de vos concitoyens ? Comment leur avez-vous expliqué votre démarche ?
Tout d’abord, les citoyens ont besoin de comprendre pourquoi, ensuite comment et quoi faire, et cela dès le début [d’un projet], car les gens n’ont généralement pas confiance en leurs gouvernements.
Quand nous évaluons, planifions, décidons comment et quoi faire dans la ville avec les citoyens, le mot passe naturellement, et des citoyens viennent avec les compétences nécessaires.
Les réseaux sociaux et la presse sont toujours importants et peuvent faire une grande différence, mais à la base, le processus doit être collectif et populaire, car c’est ici que la confiance se trouve.
Si vous deviez citer une autre ville en « modèle », laquelle mettriez-vous en avant ?
Stockholm m’impressionne beaucoup, mais d’autres villes sont également très inspirantes et cela ne serait pas juste de ne pas les mentionner.
Toutes sont à des niveaux différents de la prise de conscience publique et de la connaissance des politiques publiques, mais toutes semblent avancer à un bon rythme vers de bonnes solutions avec une bonne gouvernance et une participation de la société civile, comme Seattle, Orlande et Tel Aviv.
Sur ce domaine, Grenoble a été une très forte expérience sur le plan humain, et cela fait chaud au cœur de retourner dans cette si agréable Ville !
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